Le 17 septembre 2006, par Lézard Vert,
Place de la Bastille. Dimanche, cinq heures du matin. Nous sortons d’une boîte afro-antillaise, ivres de fatigue et (surtout) d’alcool...
... Principalement mister X, l’un des trois survivants, avec sa copine et moi, de cette soirée de folie où nous avons fêté le 1er anniversaire de mariage d’un couple de vieux amis.
Mister X est capable de boire beaucoup tout en restant en vie. Mais quitter la boîte et envisager le trajet du retour semble lui faire remonter l’alcool à la tête et il ressent le besoin de faire ce trajet à pied, plutôt que de prendre un taxi. Nous obtempérons et commençons donc par quitter la rue de la Roquette et entrer sur la place de la Bastille.
En commençant à traverser celle-ci, notre ami est pris d’une idée. Il cesse de marcher et se met à fixer la colonne de Juillet, cette belle éminence illuminée qui s’élance du centre de la place et s’élève à une bonne quarantaine de mètres, loin du trafic automobile, des pavés et des fêtards bourrés.
Je veux voir un truc, marmonne-t-il.
Quel truc ? demande sa copine.
Un truc.
Quoi ? lui demandé-je aussi.
Un truc...
Oui, mais quoi ?!
Un truc. Je veux juste aller voir un truc, et après je vous fais signe quand c’est bon, et on peut repartir.
Nous commençons à nous demander de quoi il parle et surtout, comment lui faire oublier cette idée et le convaincre de recommencer à marcher.
Je veux voir si on peut entrer. Je suis sûr que c’est ouvert. Je veux voir si on peut entrer pour monter en haut de la colonne.
La colonne de Juillet est entourée d’une barrière circulaire en fer forgé, haute d’environ 2 mètres et dont le sommet est fait de pointes métalliques. Elle comporte un portail de la même conception, bien sûr toujours fermé, surtout à 5 heures du matin.
Impossible de raisonner mister X. Nous avons peur pour lui, car pour atteindre le terre-plein central de la place, il faut traverser celle-ci en évitant les voitures et il n’y a aucun passage cloûté. Mais il persiste et sa copine le laisse faire, lui faisant jurer d’être prudent.
Il s’élance comme une fusée. Je n’imaginais pas qu’un mec aussi torché pourrait être aussi rapide sur ses jambes. Il traverse les 50 mètres qui séparent notre trottoir du terre-plein.
Pendant ce temps sa copine m’explique qu’un des amis de mister X disposait autre fois d’une clé lui permettant d’accéder à des monuments, grâce à son boulot qui consistait justement à les restaurer.
Mister X disparaît de l’autre côté du terre-plein. 2-3 mn passent. S’est-il fait écraser par une voiture, nous demandons-nous ?
Puis il réapparaît. Imperturbable. Nous nous remettons en route. Evidemment, c’était fermé.