Le 9 janvier 2003, par Lézard Vert,
"Old pirates yes they rob I - Sold I to the merchants ships - Minutes after they took I - From the bottomless pit..."
J’étais en train de finir la vaisselle avec un des mes acolytes, quand j’ai entendu cette chanson venir du réfectoire, accompagnée à la guitare. C’était un de nos hôtes africains qui la chantait, suivi en chœur par des amis à lui. C’était le soir, je me tenais sur le perron de ce petit bâtiment délabré où l’on faisait la vaisselle, sur ce campus gris, vide pendant l’été (à part nous). Dans l’air chaud et humide. Au milieu des chants des insectes nocturnes et des crapauds, bruit de fond que l’on retrouve dans chaque allée et chaque recoin. Des moustiques s’agitant dans la lumière des lampes.
J’avais eu une journée éreintante et dure moralement, précédée d’autres journées éreintantes et dures. Du boulot à n’en plus finir, des épreuves, des gens qui étaient tombés malades autour de moi et pour qui je m’inquiètais sérieusement. L’ami avec qui je faisais la vaisselle venait de me raconter la cérémonie traditionnelle d’initiation des jeunes filles, à laquelle il avait assisté le jour même dans un village : une scène très forte et marquante. Je repensais à un autre de nos hôtes togolais que, la veille, un militaire avec qui il s’était embrouillé avait menacé de tuer. Je repensais à cette bénévole du groupe en perfusion à l’hôpital de la ville. Aux problèmes du groupe. A mes propres soucis, qui me semblaient bien lourds à ce moment. L’accumulation de ces choses. Et voilà qu’a surgi "Redemption Song" de Bob Marley. Là, j’ai compris cette chanson. Le fardeau de l’existence.
"How long shall they kill our prophets - While we stand aside and look..."