Ca se passe comme ça, chez Mac Do A l’école - somewhere in Yvelines
Le 2 novembre 2008, par Lézard Vert,
Aujourd’hui c’est l’Aïd, la fête qui clôture le ramadan. Dans mon école il y a beaucoup d’élèves musulmans : turcs, maghrébins, maliens, etc.
De ce fait, plusieurs élèves m’ont prévenu hier qu’ils ne seraient pas là car ils célèbreraient cet événement en famille.
F..., 11 ans (redoublante), malienne, est un cas à part dans ma classe. C’est de loin l’élève la plus dure, désoeuvrée, mal entourée, pleine de colère, avec une très mauvaise image d’elle-même et dotée d’une intelligence et d’une malice incroyables. Très dure mais très attachante, elle sait faire alterner avec habileté la provocation et l’agressivité avec la gentillesse.
Aujourd’hui mardi, elle est venue (malgré l’Aïd) et elle est de mauvaise humeur. J’ai convoqué son père la veille pour lui dire que je voulais inscrire sa fille à un nouveau dispositif de soutien scolaire. Le père, un brave homme aux cheveux gris, parlant français avec un fort accent, analphabète, a un grand respect pour l’école et est toujours d’accord avec nous. (C’est déjà un bon point, pour "gérer" une terreur comme sa fille.) Il est d’accord à 100% avec cette idée.
Depuis cet entretien, sa fille proteste en faisant la gueule et en recommençant à faire son insolente. Donc je "monte au front" et je la saque plusieurs fois verbalement. La matinée est assez tendue. F... est tellement différente de ses camarades, tellement dure, que son humeur influe beaucoup sur l’ambiance générale de la classe.
F... m’a dit qu’elle ne viendrait sans doute pas cet après-midi. Venir juste une demi-journée, puis partir pour aller fêter l’Aïd (au lieu d’être absente la journée entière), ça fait un peu "à la carte" et je ne suis pas trop d’accord.
On quitte la classe pour aller en récréation. J’entends F... dire à ses camarades que cet après-midi, elle ira sans doute au Mac Do. Je la reprends :
Dis donc F..., j’espère que ce n’est pas pour aller au Mac Do que tu ne vas pas venir à l’école !
Elle marmonne que si, elle va sans doute y aller. Elle semble gênée. Un garçon qui était à côté explique :
On va au Mac Do quand on veut fêter quelque chose !
Du coup je comprends, et je me sens très embarrassé (même si je ne le montre pas). Dans mon esprit, le Mac Do c’est juste un lieu où on mange mal et où les ados se retrouvent. J’ai oublié que pour beaucoup de familles, surtout dans les milieux pauvres, c’est aussi l’endroit où aller faire la fête. C’est comme une sortie au restaurant.
Je suis vraiment gêné.