Le 8 janvier 2003, par Bounty Bi,
Mardi 24 décembre après-midi, je monte dans le TGV Paris-Marseille. J’ai de l’avance. Je trouve ma place et le wagon se remplit peu à peu. Soudain une effluve de camembert macéré me prend les narines. Je tourne la tête.
C’est mon voisin de voyage avec plein de sandwichs qui me dit bonjour avec un grand sourire. Je lui réponds. Une mère et deux mouflets embarquent, ils ont dans la main un pistolet en plastique qui fait des " piou-pious " électroniques. Ils sont accompagnés d’une amie qui porte un bonnet rouge avec un pompon blanc. Mais qu’est ce qu’elle fout avec ça sur le crâne ? Ah oui c’est vrai c’est Noël ! Juste à côté un papi tout chauve n’arrête pas de la yeuter.
Le wagon est maintenant rempli. Je pense qu’on est sur le point de partir quand j’entends juste derrière moi un cri de détresse de nourrisson. Que lui arrive-t-il à ce môme ? Une colique ? Une poussée de dent ? Il a faim ? Ou tout simplement est-ce l’angoisse du départ ? Quand est ce qu’on part ? Ca y est, le signal de fermeture retentit, les portes coulissent, et hop, c’est parti !
Depuis quelques minutes, mon voisin n’arrête pas de se retourner nerveusement vers le seuil du wagon. Une fois le train parti il m’explique :
" Franchement la parano sécuritaire c’est pas mon truc. Tu vois, moi, chui anarchiste ! Sarkozy d’abord i nous emmerde !".
Nous voilà au moins d’accord sur quelques points !
" Mais bon quand même ! J’me suis déjà fais volé mon sac dans le train alors j’fais gaffe jusqu’au départ".
Ça fait déjà une heure que nous traversons la France et que je suis plongé dans une bonne BD lorsque le contrôleur vient briser le doux bercement de la rame :
" Mesdameu-Messieurs bonjoureu-controleu-des-billés, silvouplé ! ". De bonne humeur et avec un accent plus que marseillais. Avec sa petite moustache noire, sa casquette en arrière, sa bedaine et sa besace, on dirait qu’il sort tout droit d’un film de Marcel Pagnol. A un gamin qui n’arrête pas de brailler :
" Comment tu t’appelleu ? Jérémy ?! Alors Jérémy ! Pourquoi tu pleureu ? T’es pas content ? Le papa Nowéleu va passer ce soir ! " Le môme stoppe net. Le contrôleur continue sa mission. Avec des bouzigues et des peuchères qui font rire tout le monde, il fait payer aux gens plein de suppléments non réglés à l’achat. Il est super motivé et il prend tout son temps. A une dame âgée : " Très bien jeune fille, votreu billé est en règle. Mais pourriez-vous me montrer une pièce d’identité ? Pour vérifier justeu que vous avez bien droit à cette réductiong ! "
Il déconne pas en plus ! Moi il commence à m’inquiéter, il vérifie un maximum de choses avec chaque voyageur ! Ne serait-il pas en pleine crise de sarkozite aigüe ?
En tout cas je crois que mon voisin l’anarchiste au camembert n’a pas un billet conforme car avant que le contrôleur n’arrive à notre niveau, il s’arrache discrètement de la rame !