L’abomination qui sortait de la douche
Le 30 avril 2006, par gabzéta, Lyon – hiver 2005
Ce soir encore, en pénétrant dans mon appartement, je suis pris à la gorge par un atroce relent de pourriture. l’odeur putride émane de la salle de bain, du conduit de la douche plus exactement. Ce soir encore, j’apaise le souffle immonde en lui accordant un demi litre de produit chimique et gluant. Je ne sais quelle hideuse créature je nourris ainsi, mais je sais que demain, cela recommencera.
Ce cérémonial impie dure depuis le début de l’hiver. Même si parfois il me semble que ma raison bascule, j’arrive encore à m’endormir…
Jusqu’à cette nuit de vendredi, où d’horribles gargouillements gutturaux me tirent d’un sommeil sans rêve. L’esprit embrumé, je me dirige à tâtons vers la salle de bain et écoute quelques secondes derrière la porte, soigneusement fermée quelques heures plus tôt. N’y tenant plus, je l’ouvre brutalement et allume la lumière.
Un dernier borborygme obscène se fait entendre, puis c’est le silence. Au fond du lavabo et dans la douche, je trouve de curieuses déjections membraneuses et grisâtres. Incapable d’en entrevoir la nature organique ou végétale, je retourne me coucher, hanté par l’image écœurante d’une larve géante attendant la fin de sa mue pour émerger des tuyaux.
Le matin, je me réveille assommé. Je suis en retard pour le travail, alors je quitte précipitamment mon appartement sans m’attarder dans la salle de bain. Je suis de retour vers minuit, après une journée laborieuse et un apéro en ville qui m’a définitivement épuisé. Demain à l’aube, je dois prendre le train pour Paris et je n’ai pas encore fait mon sac. Sur la porte de mon appartement, je trouve un mot de la voisine « Merci de passer au plus vite, problème sanitaire grave »….
J’ouvre la porte… Et me voila qui patauge dans une flaque de pisse diluée, de merde et de papier hygiénique décomposé ! Aaarg ! Bouchées depuis une semaine, les chiottes des voisins ont fini par s’évacuer par ma douche et se sont déversées jusque dans mon couloir ! C’est beau la mécanique des fluides… Et idéal à quelques heures d’un départ en vacances ! Il ne me reste plus qu’à éponger tout ça… Bon appétit.